Journée mondiale sans facebook
Non mais c'est une blague ou quoi ?? Je vous fleurir partout des "pour la journée mondiale sans facebook ..." Sachez, mesdames et messieurs les facebookiens ou anti-facebookiens qu'aujourd'hui, c'est surtout la journée internationales des maladies rares.
En tant que personne atteinte d'une pathologie orpheline, cette journée me fait bouillir ! Pourquoi me direz-vous ? C'est comme la journée de la femme. Bien qu'étant une femme, je ne pense pas qu'on devrait consacrer une journée aux femmes. Existe t'il une journée de l'homme ? Si on ne considérait pas la différence comme une faiblesse, on n'aurait pas besoin d'inventer des journées spéciales pour les gens considérés plus faibles. Est-ce qu'on n'entretient pas les inégalités en créant la journée de ceci ou cela ?
J'aurais dû faire un plan pour la rédaction de ce billet parce que je pars dans tous les sens et je sais qu'il va être totalement décousu ^^.
Aujourd'hui, je ressens de la colère. Il n'y a qu'une chose qui me met véritablement en colère : l'injustice ! Je ne parle pas de l'injustice d'être malade parce que je ne suis absolument pas le genre de personnes à me lamenter en disant : pourquoi moi ? Non, après tout, pourquoi quelqu'un d'autre ? Il fallait bien que ce petit chiffre, qui correspond au pourcentage de personnes atteintes du Syndrome d'Ehlers Danlos ... Il fallait bien quelqu'un pour représenter ce chiffre. Ce chiffre, c'est moi et tellement d'autres ...
D'abord, je ne me considère pas comme quelqu'un de malade. Je suis née avec un code génétique différent. Je suis une sorte de mutante. Bien sûr, cette anomalie génétique me handicape. Je suis handicapée. Mais quand son corps ne répond pas comme celui des autres, on développe vite des facultés d'adaptations extraordinaires : je suis la reine des systèmes D. Le handicap ne me gène pas. Je ne me sens pas diminuée. Je dois juste constamment m'adapter.
Alors, pourquoi est-elle en colère me direz-vous ? Simplement parce que dans ma vie de tous les jours, j'ai le sentiment de toujours devoir me justifier. J'ai l'impression de devoir constamment rendre des comptes sur ce que je suis. Parce que la société refuse de s'adapter à moi, à nous les personnes handicapées, même quand la loi est de notre côté. Parce que la discrimination envers les handicapés n'est pas un mythe.
J'ai dû quitter une asso où je travaillais parce que je n'étais pas aussi rentable que les autres. Mon employeur n'a jamais compis que mon cas était différent de celui des gens "normaux", des non-mutants. Lassée de devoir expliquer qu'il n'était pas question de mauvaise volonté mais de santé, que j'avais des droits ... Je suis partie. Et le jour de mon départ, un de mes collègues, quelqu'un pour qui j'avais de l'amitié, m'a dit que ce qui arrivait était de ma faute : j'aurais dû accepter tout ce qu'on me proposait parce que c'était moi la malade. Je l'avais bien cherché ! Depuis quand le fait d'être handicapé nous prive de notre liberté de choisir ? De notre libre-arbitre ?
Il y a les fois où on me dévisage parce que, garée sur une place handicapée, je sors de ma voiture et en fait le tour pour sortir mon fauteuil roulant du coffre. Je n'ose plus sortir ma carte d'invalidité lorsque je suis à une caisse parce que je me suis fait insultée tellement de fois. Et oui, quand je suis sur mes pieds, j'ai l'air en parfaite santé ...
Ou ces fois où je rentre dans un magasin en disant "bonjour" et on ne me répond même pas. La personne d'après, aura le droit à son bonjour. Les fois où il existe des aménagements pour les handicapés mais qui sont utilisés par les valides. Une cabine d'essayage qui devient une zone de stockage, une place handicapée qui devient un hangar à voitures pros ... La raison : "elles ne sont jamais utilisées". Sauf que quand elle pourrait l'être, elles ne sont pas disponibles. Ca n'encourage pas à sortir. Imaginez l'épuisement physique et psychologique qu'engendre ce genre de batailles inutiles, ces justifications incessantes.
Je n'aime pas la pitié, c'est quelque chose de détestable mais parfois, j'ai envie de demander aux gens : connaissez-vous les mots empathie ou compassion ? N'essayez-vous jamais d'en savoir plus que ce que vous voyez ? Il y a une sorte de pudeur des gens valides qui les encourage à porter des jugements ou à ignorer les personnes handicapées plutôt que d'oser poser des questions. C'est ridicule. S'interroger, c'est chercher à comprendre, c'est accepter. Communiquer avec les gens, c'est rompre l'isolement.
Voilà, aujourd'hui, pour la journée des maladies rares, j'ai envie de crier : JE SUIS RARE MAIS J'EXISTE ! et je ne suis pas la seule dans ce cas. Je suis physiquement fragile mais je ne suis pas faible. J'ai développé des compétences qu'une personne valide n'aura jamais à développer. Ce que je vis au quotidien, avec le sourire, prouve combien je suis forte au contraire. Quand des gens se noient dans un verre d'eau, les gens comme nous affrontent des ouragans plusieurs fois par jour et ne tombent jamais à genoux. Je suis handicapée mais je ne vaux pas moins que les autres.
La journée des maladies rares, c'est mon quotidien.